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Formation: La réalité virtuelle s’invite en classe

L’immersion pour comprendre des notions abstraites ou répéter des gestes semble être un outil efficace. La réalité virtuelle s’invite dans la formation supérieure, dans le département de chimie de l’université et à l’institut HumanTech de la HEIA notamment.

Les étudiants en chimie de l’Université de Fribourg peuvent s’amuser à décortiquer les molécules grâce à un nouveau programme en réalité virtuelle. © Jean-Baptiste Morel
Les étudiants en chimie de l’Université de Fribourg peuvent s’amuser à décortiquer les molécules grâce à un nouveau programme en réalité virtuelle. © Jean-Baptiste Morel

Claire Pasquier

Publié le 05.05.2024

Temps de lecture estimé : 4 minutes

A l’écran, un petit personnage s’attaque à une molécule d’hémoglobine géante qu’il agrandit, fait tourner dans les airs et décortique à sa guise. Le tout sur une petite musique de smooth jazz. Devant l'écran, le président du département de chimie de l’Université de Fribourg Ali Çoskun fait de grands gestes dans le vide, manettes en main, casque sur les yeux. Il présente la nouvelle technologie de réalité virtuelle qui agrémente les leçons de chimie depuis ce semestre de printemps: vingt casques de réalité virtuelle à disposition des élèves et enseignants.

Offre inédite

Une première en Suisse, s’est réjouie la rectrice de l’université et professeure de chimie Katharina Fromm lors de l’inauguration de cette nouvelle offre: «L’Université de Fribourg se montre leader dans ce type d’enseignement. C’est important car, bien que nous manquions de place, notre enseignement offre les meilleures infrastructures.»

Alors qu’Ali Çoskun lève le voile «sur le mystère de la caféine et son pouvoir énergisant», il présente en détail le software Nanome et le large panel des contenus disponibles: Covid-19, cartes de densité électronique, simulations de dynamique moléculaire, etc. Les enseignants peuvent aussi importer du contenu dans le programme.

L’objectif avec ce nouvel outil est de permettre aux étudiants d’appréhender ces molécules chimiques infiniment petites et abstraites: «Il est très difficile de passer d’un tableau bidimensionnel à tridimensionnel, mais avec la réalité virtuelle, je peux mieux comprendre leurs formes et leurs structures dans l’espace. Avec mes deux mains, je peux faire interagir deux molécules, comprendre comment une réaction chimique peut se faire, comment un médicament peut interagir avec les molécules de notre corps», détaille Katharina Fromm.

«Beaucoup d’étudiants disent qu’ils ont l’impression de jouer»
Ali Çoskun

Ce nouvel outil pédagogique aura coûté environ 30 000 francs, selon Ali Çoskun. Ceci sans compter l’installation d’un wi-fi spécifique qui soit assez puissant pour faire fonctionner les 20 casques simultanément et le travail de l’équipe informatique. «Un challenge de mise en place qui a pris deux ans», confie le professeur.

Tous les étudiants à qui sont dispensées des leçons de chimie utiliseront ce programme, du bachelor au master. «Les premiers feedbacks sont positifs. Beaucoup disent qu’ils ont l’impression de jouer, tout en apprenant des choses», souligne le président du département. Les élèves pourront librement s’y essayer en dehors des heures de cours à condition de réserver la salle en amont. S’il n’est pas question d’enseigner toutes les nouvelles matières via le programme, Ali Çoskun estime que la réalité virtuelle servira à l’enseignement des matières les plus complexes.

A la Haute Ecole d’ingénierie et d’architecture (HEIA) de Fribourg, l’institut HumanTech travaille avec les nouvelles technologies et les interactions avancées entre machine et humain sur des projets qui contribuent à développer une «société intelligente». Quelques projets ont été présentés à l’occasion de l’inauguration de la classe virtuelle de chimie de l’Université de Fribourg le 26 avril.

Etudiants en santé

Plusieurs de ces développements ont une vocation pédagogique. A l’instar du Digital Health and Care Competence Center en collaboration avec la Haute Ecole de santé de Fribourg. Dans ce centre, les étudiants en soins infirmiers s’exercent aux différentes étapes d’asepsie grâce à des casques de réalité virtuelle.

La sensibilisation aux germes croisés y est par exemple entraînée: le patient est contaminé et le soignant aussi, mais par deux virus différents. Chaque étape de l’exercice de la prise de sang permet d’intégrer les gestes de désinfection pour éviter une contamination. L’exercice est disponible en mode facile avec les germes visibles en deux couleurs distinctes ou en mode difficile, sans voir les germes. «Les gestes reproduits par l’avatar sont simplifiés, c’est la procédure qui compte», explique Marine Capallera, doctorante à l’institut.

Dans une même idée, l’exercice peut être transposé à une cuisine industrielle et aux normes d’hygiène et de sécurité à respecter. «Un nouveau scénario avec le départ d’un feu de friteuse a été créé pour pouvoir s’entraîner plusieurs fois avant l’exercice avec un pompier», détaille encore la collaboratrice scientifique.

Le champ d’application de la réalité virtuelle s’étend également aux enfants plus jeunes et pour apprendre des notions de base. Les chercheurs et étudiants de la HEIA ont mis sur pied un simulateur pour enfants avec une déficience intellectuelle. «Traverser la route peut se révéler compliqué. Alors on peut les entraîner un maximum en réalité virtuelle et ensuite voir comment cet apprentissage peut se transférer vers la réalité», présente Robin Cherix, collaborateur scientifique.

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